ACL : Faut-il vraiment attendre 9 mois pour reprendre le sport ?

Apr 27 / Arnaud BRUCHARD
9 mois : un seuil mythique ou une vraie sécurité ?
Depuis la publication de Grindem en 2016, la règle tacite des 9 mois avant de reprendre le sport après une reconstruction du ligament croisé antérieur (ACLR) s’est largement imposée. Mais cette temporalité est-elle toujours justifiée, surtout à l’heure où l'on parle d’objectifs fonctionnels, de tests de sortie et de réhabilitation personnalisée ?

L’étude prospective de Kotsifaki et al. (2025), menée auprès de 530 sportifs masculins pratiquant des sports avec pivot, remet la notion de « sweet spot » temporel en perspective : ce n’est pas le moment du retour qui importe le plus, mais comment on y revient.-
L’étude visait à répondre à deux questions clés :

  • Quels sont les facteurs réellement associés à une reprise des sports pivotants 2 ans après une reconstruction du LCA ?
  • Le délai de reprise (≤9 mois vs >9 mois) influence-t-il le risque de blessure secondaire, si les critères de retour sont respectés ?

Résultats majeurs à retenir

 Le respect des critères = 6 fois plus de chances de reprendre

  • 90 % des sportifs qui ont terminé la réhabilitation et respecté les critères objectifs sont retournés à leur sport pivotant.
  • En revanche, seulement 50 % de ceux qui ont arrêté leur rééducation prématurément ont repris le sport.
  • Les critères de retour incluaient : tests sans douleur, symétrie de force >90 %, symétrie de saut >90 %, protocole spécifique sport complété, et éducation à la prévention.

 Le timing n’a pas d’impact… si les critères sont remplis

  • Parmi les 190 athlètes ayant atteint les critères, ceux qui ont repris avant ou après 9 mois n’avaient pas plus de risque de blessure au genou ou au LCA.
  • HR pour nouvelle blessure au genou : 0.892 (NS)
  • HR pour nouvelle blessure du LCA : 0.718 (NS)

 Adhésion = dose-réponse

  • Plus un athlète avance dans les phases de rééducation (précoce → intermédiaire → avancée), plus la probabilité de retour est élevée :
  • Phase précoce : 46 % de retour
  • Phase intermédiaire : 70 %
  • Critères atteints : 90 %

Une réatlétisation structurée, évaluée, personnalisée

L’étude met en lumière le rôle fondamental de la qualité de la rééducation, bien plus que du temps écoulé.

Le protocole suivi à l’Aspetar (Qatar) incluait :

  • Rééducation pré-opératoire (mobilité, force)
  • 3 phases post-opératoires progressives
  • Évaluations toutes les 6 semaines, réalisées par des testeurs indépendants

Les critères objectifs guidaient la progression, non le calendrier. Cette approche centrée sur l’évaluation continue a permis, en comparaison avec les cohortes précédentes, de diviser par deux le taux de re-blessures.

9 mois n’est pas une barrière magique

Cette étude renforce l’idée déjà soutenue dans plusieurs revues systématiques récentes : retarder la reprise n’est efficace que si la rééducation suit un vrai protocole structuré. Le facteur « temps » est nécessaire (biologie du greffon, récupération), mais insuffisant seul.

Un athlète peut reprendre avant 9 mois si et seulement si tous les critères fonctionnels sont atteints. À l’inverse, attendre 12 mois ne protège pas s’il n’a pas récupéré ses capacités.

Ce que cela change en pratique

Le délai de 9 mois est un guide, pas une loi.

L’évaluation fonctionnelle doit primer sur la date.
L’adhésion du patient à son programme fait toute la différence.
Le retour doit être vu comme un continuum progressif, et non un feu vert administratif.

CONCLUSION

CONCLUSION

CONCLUSION

CONCLUSION

CONCLUSION

CONCLUSION

CONCLUSION

L’étude de Kotsifaki et al. (2025) ne remet pas en cause la pertinence des 9 mois comme repère minimal post-ACLR, mais elle démontre que ce n’est pas le facteur déterminant du retour au sport en sécurité.

✔️ Ce qui compte, ce n’est pas combien de temps on attend, mais ce qu’on fait pendant ce temps.
✔️ La qualité de la rééducation, son suivi structuré, et le respect des critères objectifs sont les vrais piliers de la reprise.
✔️ Et cela implique un athlète engagé dans sa progression, un kiné formé aux tests de sortie, et un cadre de suivi individualisé, mesurable, raisonné.

En somme :
  • 9 mois ne protègent pas si on n’est pas prêt.
  • Et parfois, on peut être prêt avant… mais jamais sans preuve.

L'ARTICLE

Kotsifaki R, King E, Bahr R, Whiteley R. Is 9 months the sweet spot for male athletes to return to sport after anterior cruciate ligament reconstruction? Br J Sports Med. 2025. doi:10.1136/bjsports-2024-108733